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Un vaccin à ARN messager, proche du vaccin tozinaméran.  Le vaccin Sars-CoV-2 ARNm-1273 est un vaccin à ARNm (acide  ribonucléique messager). Il est très proche du vaccin tozinaméran (lire ici).  Dans ces deux vaccins, les brins d'ARNm codent pour une protéine de  surface du virus dite protéine Spike. Les brins d'ARNm sont contenus  dans des nanoparticules lipidiques, différentes selon le vaccin, qui  elles-mêmes contiennent du polyéthylène glycol (PEG) 2000. Ces deux  vaccins sont sans adjuvant ni conservateur (1,2).
Un essai clinique chez environ 30 000 adultes, dont environ 7 600 professionnels de santé.  Début janvier 2021, l'évaluation clinique du vaccin Sars-CoV-2  ARNm-1273 est centrée sur un essai randomisé, versus placebo, chez  environ 30 000 personnes âgées de 18 ans et plus. Levaccin ou le placebo  ont été administrés en deux injections espacées de 28 jours. La moitié  des participants étaient âgés de 53 ans ou plus. Environ 25 % étaient  âgés de 65 ans ou plus, et environ 5 % étaient âgés de 75 ans ou plus.  L'absence d'antécédent de maladie covid-19 a été confirmée chez 95 % de  l'ensemble des participants. 22 % avaient au moins un facteur de risque  de covid-19 grave en dehors de l'âge. Environ 25 000 participants  avaient une activité professionnelle les exposant à un risque élevé de  contracter la maladie covid-19, dont environ 7 600 professionnels de  santé (1).
Dans cet essai, les injections du vaccin ou du placebo ont été  réalisées au cours de l'été et de l'automne 2020 aux États-Unis  d'Amérique, c'est-à-dire avant l'identification de certains variants du  virus Sars-CoV-2, isolés en décembre 2020 notamment au Royaume-Uni et en  Afrique du Sud (1,3).
Les participants à l'essai et les investigateurs évaluant  l'efficacité et les effets indésirables n'avaient pas connaissance du  produit injecté. Mais comme dans le principal essai ayant évalué  l'efficacité clinique du vaccin tozinaméran, les personnes responsables  de la réception des vaccins, de la préparation des doses ou de  l'injection avaient connaissance de cette information. Cela a rendu  possible une divulgation de cette information à des personnes censées ne  pas la connaître (investigateurs et participants) (4). Il est aussi  possible que certains participants aient deviné quel produit leur était  injecté compte tenu des effets indésirables locaux ou systémiques très  fréquents du vaccin (lire ci-dessous). Ces incertitudes autour du  respect du secret concernant le produit injecté diminuent le niveau de  preuves des résultats.
À court terme, forte diminution du nombre de cas de maladie covid-19 symptomatique dans le groupe vaccin.  L'efficacité a été évaluée en recensant, à partir du 14e jour après la  deuxième injection, les cas de maladie covid-19 symptomatique confirmée  par un examen biologique (critère principal d'évaluation). Avec un suivi  médian de 9 semaines après la deuxième injection, il y a eu 12 cas de  covid-19 dans le groupe vaccin versus 187 dans le groupe placebo, soit  une réduction relative du risque de covid-19 symptomatique de 94 %  (intervalle de confiance à 95 % (IC95) : 89 % à 97 %). Un effet  préventif du vaccin a semblé apparaître environ 15 jours après la  première injection (1,5).
Chez les 675 patients ayant eu une infection par le Sars-CoV-2  documentée avant l'essai, il y a eu un seul cas de covid-19, qui a été  rapporté dans le groupe placebo (1,5).
À partir du 14e jour après la deuxième injection, une personne du  groupe vaccin a eu une maladie covid‑19 considérée comme sévère (mais  non prise en compte par les investigateurs de l'essai car confirmée par  RT-PCR dans un laboratoire d'analyses extérieur à l'essai) versus  30 personnes dans le groupe placebo. Parmi ces 30 personnes, 9 ont été  hospitalisées et une est morte des suites de la maladie covid-19 (1).
Efficace chez les personnes âgées de moins de 65 ans avec un  facteur de risque de covid-19 grave ; efficacité d'ampleur inconnue chez  les personnes âgées de plus de 75 ans. Chez les participants  âgés de moins de 65 ans ayant au moins un facteur de risque de covid-19  grave tel qu'une affection respiratoire chronique, une maladie  cardiaque, une obésité sévère ou un diabète, la diminution relative du  risque de covid-19 toutes gravités confondues à partir du 14e jour après  la deuxième injection a été de 94 % (IC95 : 77 % à 99 %) (5). Chez les  personnes âgées de 65 ans et plus, l'efficacité a été de 86 %, avec un  IC95 encore plus large, allant de 61 % à 95 % (1). Ces intervalles de  confiance plus larges que celui obtenu pour l'ensemble des participants  reflètent une plus grande incertitude quant à la diminution relative  du risque dans ces sous-groupes de personnes.
Cet essai n'a pas été conçu pour évaluer l'efficacité du vaccin  Sars-CoV-2 ARNm-1273 chez les personnes âgées de 75 ans et plus, qui  n'ont compté que pour environ 5 % des participants. Chez ces personnes,  on ne dispose que de données issues d'une analyse intermédiaire  rapportant seulement 3 cas de covid-19, tous chez des personnes qui  avaient reçu le placebo. Ces données ne permettent pas d'évaluer  l'ampleur de la diminution du risque de covid-19 chez les personnes les  plus âgées, même si une efficacité paraît vraisemblable quand on prend  en compte l'ensemble des résultats (1,5).
Effets indésirables locaux et systémiques, dont des réactions d'hypersensibilité.  Les principaux effets indésirables prévisibles des vaccins à ARNm sont  ceux des vaccins en général : réactions locales au site d'injection et  réactions systémiques. Une aggravation d'une éventuelle infection par le  Sars-CoV-2 par le vaccin est une hypothèse à prendre en compte, vu ce  qui a été observé dans certaines études animales avec un vaccin  coronavirus Sars-CoV-1. La présence de polyéthylène glycol (PEG) expose à  des réactions d'hypersensibilité et à des réactions anaphylactiques.  Début 2021, le recul d'utilisation des vaccins à ARNm est faible, d'où  de nombreuses inconnues concernant leur profil d'effets indésirables.
Dans l'essai versus placebo chez environ 30 000 personnes, selon une  analyse de l'Agence étatsunienne du médicament (FDA), des réactions  locales dans les 7 jours suivant une injection ont été rapportées chez  92 % des personnes dans le groupe vaccin versus 29 % dans le groupe  placebo, avec surtout des douleurs et des adénopathies axillaires. La  fréquence des réactions locales considérées comme intenses a été de 9 %  dans le groupe vaccin versus 1 % dans le groupe placebo. La durée  médiane des réactions locales a été de 2 à 3 jours (1).
Des événements indésirables systémiques dans les 7 jours suivant la  vaccination ont été rapportés chez 83 % des personnes dans le groupe  vaccin versus 53 % dans le groupe placebo, avec surtout des : fatigues,  maux de tête, douleurs musculaires ou articulaires, frissons, fièvres,  nausées ou vomissements. La durée médiane a été de 2 jours. Chez une  minorité de patients, la réaction systémique a duré au moins 7 jours. La  fréquence des réactions considérées comme intenses après la deuxième  dose a été de 16 % dans le groupe vaccin versus 4 % dans le groupe  placebo (1).
Des réactions d'hypersensibilité ont été rapportées chez 1,5 % des  participants dans le groupe vaccin versus 1,1 % dans le groupe placebo.  Il n'y a pas eu de réaction grave ni de réaction anaphylactique au cours  de l'essai (1). Une réaction allergique grave a toutefois été rapportée  en dehors de l'essai clinique chez une personne allergique aux fruits  de mer (6). Un cas d'angiœdème des lèvres et deux cas de gonflement du  visage ont été décrits lors de l'essai, tous les trois chez des femmes  du groupe vaccin qui avaient reçu des injections de substances pour  comblement dermique. Des troubles semblables ont déjà été rapportés lors  d'infections virales. Trois personnes qui ont reçu le vaccin ont eu une  paralysie faciale (guérie dans deux cas) versus une personne dans le  groupe placebo (1).
Modalités pratiques différentes des deux vaccins à ARNm : prévenir les erreurs.  Le vaccin Sars-CoV-2 ARNm-1273 de la firme Moderna est à conserver  congelé à une température comprise entre -25 °C et ‑15 °C (congélateur  usuel). Une fois décongelé, la durée de conservation du vaccin est de  30 jours au réfrigérateur entre 2 °C et 8 °C et de 12 heures entre 8 °C  et 25 °C. La dose de vaccin Sars-CoV-2 ARNm-1273 est de 0,5 ml, à  prélever directement dans le flacon. Chaque flacon contient 10 doses, à  utiliser dans les 6 heures une fois la première dose prélevée (7,8).
Ces caractéristiques sont différentes de celles du vaccin tozinaméran  des firmes Pfizer et BioNTech. Ce dernier est à conserver congelé entre  -80 °C et -60 °C. Une fois décongelé, la durée de conservation est de  5 jours dans un réfrigérateur entre 2 °C et 8 °C et de 2 heures  à température ambiante, sans dépasser 30 °C. Avant son utilisation, le  vaccin tozinaméran est à diluer avec 1,8 ml de solution de chlorure de  sodium à 0,9 %, à ajouter dans chaque flacon. La dose de vaccin  tozinaméran est de 0,3 ml, à prélever directement dans le flacon. Chaque  flacon contient 5 doses, à utiliser dans les 6 heures après la  dilution (7,8).
Les équipes ayant à gérer en même temps les deux vaccins auront à  mettre en place des mesures de prévention des erreurs, telles que noter  sur le conditionnement la date et l'heure de décongélation, et la date  et l'heure limites d'utilisation.
Les conditionnements multidoses du vaccin Sars-CoV-2 ARNm-1273 et du  vaccin tozinaméran exposent à des erreurs, notamment à l'injection de  plusieurs doses en une fois chez une seule personne. De telles erreurs  ont déjà été rapportées (9).
En pratique, une efficacité à court terme chez les adultes, mais des incertitudes.  Le principal essai clinique comparatif ayant évalué le vaccin  Sars-CoV-2 ARNm-1273, à raison de deux injections espacées de 28 jours,  apporte quelques repères pour aider les personnes visées par la  vaccination, dans l'attente d'une analyse approfondie :
    - Cet essai a inclus environ 30 000 personnes âgées de 18 ans et  plus. La moitié des patients avaient plus de 53 ans. Environ 25 %  avaient plus de 65 ans et environ 22 % avaient au moins un facteur de  risque de covid-19 grave autre que l'âge.
- Cet essai a montré que ce vaccin a une efficacité globalement  élevée pour prévenir à court terme les cas symptomatiques de la maladie  covid-19, y compris les formes sévères ; mais comme avec le vaccin  tozinaméran, la durée de cette protection n'est pas connue.
- Chez les personnes âgées de moins de 65 ans avec un facteur de  risque de covid-19 grave autre que l'âge et chez celles âgées de 65 ans à  75 ans, l'efficacité à court terme du vaccin pour prévenir la maladie  covid-19 paraît élevée, mais avec une marge d'incertitude un peu plus  grande.
- Cet essai n'a pas été conçu pour évaluer l'efficacité du vaccin  Sars-CoV-2 ARNm-1273 chez les personnes âgées de 75 ans et plus, qui  n'ont compté que pour environ 5 % des participants. Chez ces personnes,  comme avec le vaccin tozinaméran, en tenant compte de l'ensemble des  données de l'essai, une efficacité paraît vraisemblable, mais  son ampleur est inconnue.
- Les effets indésirables connus du vaccin sont surtout des  réactions locales et systémiques très fréquentes, parfois intenses, et  des réactions d'hypersensibilité. Il n'a pas été mis en évidence de  signal particulier d'effets indésirables, mais il subsiste encore de  nombreuses inconnues inhérentes au faible recul d'utilisation, comme  avec n'importe quel autre nouveau médicament, vaccin ou autre.
En somme, début 2021, ce que l'on sait et ce que l'on ne sait pas  avec le vaccin Sars-CoV-2 ARNm-1273 est très proche de ce que l'on sait  et de ce que l'on ne sait pas avec le vaccin tozinaméran (lire ici).  Ces informations, ainsi que celles concernant le risque de contracter  une forme grave de covid-19, sont à fournir aux personnes concernées par  cette vaccination, en prenant le temps nécessaire, y compris avec  celles qui auront des difficultés à les percevoir et à les comprendre.  Donner aux personnes qui le souhaitent un temps de réflexion avant  qu'elles prennent leur décision (dans un sens ou dans un autre) est une  démarche indispensable.
© Compétence 4 • 6 janvier 2021
Sources :
    - "Dans l'actualité. Vaccin covid-19 à ARN messager de la firme Moderna : quelques données et des incertitudes, comme avec le vaccin tozinaméran (Comirnaty°, des firmes Pfizer et BioNTech)" Application Prescrire (6 janvier 2021)
    - FDA "FDA briefing document. Moderna covid-19 vaccine" 17 décembre 2020 : 54 pages.
- Prescrire Rédaction "Vaccin covid-19 à ARN messager tozinaméran  (Comirnaty° des firmes Pfizer et BioNTech) et personnes âgées : quelques  données, beaucoup d'incertitudes" 23 décembre 2020.
- A study to evaluate efficacy, safety, and immunogenicity of  mRNA-1273 vaccine in adults aged 18 years and older to prevent covid-19.  NCT04470427". Site www.clinical.trials.gov consulté le  30 décembre 2020.
- Moderna TX "A phase 3, randomized, stratified, observer-blind,  placebo-controlled study to evaluate the efficacy, safety, and  immunogenicity of mRNA-1273 sars-CoV-2 vaccine in adults aged 18 years  and older. Clinical study protocol" 23 décembre 2020 : 158 pages.
- Moderna TX "MRNA-1273. Sponsor Briefing document" 17 décembre 2020 : 84 pages.
- APMNews "Un décès après vaccination contre le covid-19 en Suisse, pas de lien démontré" 30 décembre 2020 : 2 pages.
- Commission européenne "RCP-Comirnaty" 29 décembre 2020 : 15 pages.
- Santé Canada "Monographie-Vaccin de Moderna contre la covid-19" 23 decembre 2020 : 25 pages.
- AFP "covid-19 : huit personnes reçoivent par erreur cinq doses de vaccin en Allemagne" 28 décembre 2020 : 1 page.
Pour en savoir plus :
 ÉPIDÉMIE COVID-19   Des informations pour y voir clair > ICI
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